De la Charité à la Bienfaisance et de l’Aide Sociale à l’Action Sociale
A travers les siècles, les grands courants religieux ont fait de la charité une vertu cardinale, selon laquelle il faut rendre à chacun ce qui lui est dû. élle s’exprime dès lors par des bienfaits, des aumônes. En occident, le Christianisme a apporté un élément nouveau, celui de l’amour du prochain et une idée de justice universelle. Au cours du temps, la manifestation de la charité connaîtra en France d’importantes mutations dans ses formes et dans sa nature. Pendant longtemps, le clergé assumera, par des fonds d’origine privée les offices de la charité. A la suite d’une longue évolution, la notion de charité s’estompe pour faire place à celle de la bienfaisance, laquelle répond mieux aux élans populaires de générosité, aux moyens et aux nécessités de l’époque.
Au cours du XVIIe siècle, l’assistance collective, longtemps abandonnée à l’initiative privée, surtout d’inspiration religieuse, qualifiée ” œuvres de charité ou œuvres de bienfaisance ” est progressivement prise en main par le pouvoir royal. Au XVIIIe, des ” ateliers de charité ” sont lancés pour les ouvriers sans travail. Un fait nouveau commence à apparaître : la prise en compte de l’aspect social et de l’aspect moral de la bienfaisance. A la fin du siècle, se pose le problème de la reconnaissance constitutionnelle des Droits de l’homme pauvre sur la Société et ceux de la Société sur lui. En 1793 est mis sur pied une organisation de l’assistance publique de nature à procurer aux citoyens nécessiteux l’aide de la collectivité : protection de la famille et de l’enfant, secours aux sans emploi, aux infirmes et incurables, aux vieillards et aux victimes de calamités diverses, soins gratuits. On estime que plus d’un tiers de la population, au cours de la période révolutionnaire, a été secouru par les pouvoirs publics, l’Etat ayant dû prendre en charge l’assistance aux malheureux au moment où la nationalisation des biens du clergé prive l’Eglise des ses ressources.
Au XIXe Siècle, le mouvement d’industrialisation s’accompagne de la création d’autres institutions charitables, parfois d’origine patronale. Des ” caisses de prévoyance ” voient le jour, le Second Empire favorise l’essor des ” sociétés de secours mutuel “. Reposant à l’origine sur la seule notion de charité, la bienfaisance se trouve de plus en plus orientée vers des exigences de justice et de solidarité. L’expression ” justice sociale ” apparaît bientôt et exprime un besoin d’organiser la répartition des richesses suivant des critères moraux, ce qui revient à mettre l’économie au service de l’homme. Sous la IIIe République, les notions de droits et de devoirs cèdent la place au concept de solidarité. Il procède d’un principe de dépendance mutuelle entre les hommes et concoure à leur développement.
La législation de la IIIe République repose sur l’idée que l’assistance doit être essentiellement communale. Mais, l’Etat assumant une part croissante du financement, il renforcera en 1935 les pouvoirs de la tutelle et harmonisera les allocations versées par les communes d’un même département. L’instauration des assurances sociales, puis de la Sécurité sociale, met en place un système de couverture automatique des aléas de l’existence, fondé sur la redistribution. A partir de 1945, le pouvoir de décision en matière d’aide légale est dévolu progressivement aux services extérieurs de l’Etat à l’échelon départemental, tels que les directions départementales de l’action sanitaire et social, les DDASS, créées en 1964. Une réforme plus générale est effectuée en 1953-55 en vue de simplifier la réglementation de l’assistance, désormais appelée ” aide sociale “. En 1986, dans le cadre des lois de décentralisation l’action sociale remplace l’aide sociale. Les modalités d’intervention des collectivités locales s’en trouvent profondément modifiées. L ‘assistance collective est de plus en plus sollicitée. La création de la couverture médicale universelle par la loi du 27 juillet 1999 procède de cette idée généreuse que l’Etat doit pourvoir aux besoins de logement, de nourriture et de santé de tous les citoyens.
D’après : le Centre Communal d’Action Sociale, Claude Chaumet-Riffaud, Editions du Papyrus